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Les origines (partie 3) : l’essor au cœur des montagnes japonaises


Dans les régions montagneuses de Iga, Koga ou Ueno, provinces du centre du Japon, s’étaient constitués divers types de communautés. Il y avait en effet là toutes sortes de « laissés pour compte », vagabonds, mendiants, exilés politiques, fuyards, parfois des familles voir des clans entiers. Il y a avait aussi ces Kugutsu, artistes itinérants du spectacle, maîtres de l’illusion…Vivant ainsi par la force des choses près de la nature, dans des huttes de branchage, des grottes naturelles ou creusées dans l’abondant tuf volcanique, tous ces gens se mêlèrent aux ascètes qui y vivaient loin de tout, laïques ou moines guerriers (Yamabushi), magiciens ou sorciers, ermites et mystiques de toute sorte (Ubasoku, Sennin), diseuse de bonne aventure (Miko).

Tout ce monde finit par cohabiter, s’organiser par affinités, mettant en commun les religiosités éveillées au contact de la nature, les pratiques bouddhiques et la mystique shintoïste. Un nouveau regard sur la vie s’élaborait ainsi dans ces montagnes, loin des cérémonies figées de la cour et des compromissions politiques. Mais cela ne pouvait durer : l’hostilité vite éveillée, du clergé établi, jaloux de tant d’indépendance, eut tôt fait de convaincre le pouvoir que ces marginaux qui prétendaient prendre un raccourci vers les Dieux ne pouvaient être que des fauteurs de troubles et qu’il valait mieux les éliminer pendant qu’il était encore temps. Ce qui fut tenté : la lutte s’engagea entre les tenants de l’ordre, dans les plaines, et ceux de la montagne, défendant leur liberté d’être autrement…Or ces derniers étaient chez eux, parfaitement intégrés à leur environnement, ce qui explique que personne ne pu jamais les déloger définitivement au cours des siècles. Bien au contraire : l’effet le plus durable de cette épreuve de force fut en réalité le renforcement de certaines de ces communautés, qui s’organisèrent et se durcirent au point de devenir de terribles partis guerriers avec lesquels le pouvoir central n’eut jamais fini de découdre (ainsi la lutte engagée contre les terribles moines-guerriers du Mont Hei) en face desquels il eut souvent le dessous. Une autre conséquence de ce harcèlement fut l’expérimentation et l’amélioration de techniques de combat et de survie, s’appuyant étroitement sur le cadre local : il ne fait aucun doute que les survivants ne durent leur survie qu’à une parfaite connaissance des techniques de camouflage et de guérilla ; Tous ces gens étaient en train de devenir des ninja, simplement pour défendre ce choix de vie…ils n’étaient pas encore mercenaires, mais hommes libres, et farouchement décidés à le rester.


Il y avait une volonté de survivre, donc très vite la mise au point de techniques adéquates. Il y eut aussi l’esprit, le tout constituant très vite un ensemble assurant une quasi invulnérabilité. Et l’esprit qui se mit à imprégner le comportement ninja finit par donner à ces hommes non seulement une fantastique puissance intérieure mais également les couper du reste  d’un monde médusé, en faire des êtres à part, surnaturels, sorciers…Cet esprit était, comme le reste, un dosage de tout ce qu’ils avaient appris du milieu ambiant, imprégné des doctrines ésotériques du Shugendo et du Shingon.

Le premier de ces courants est d’abord une nouvelle orientation du Bouddhisme s’appuyant sur une conception nouvelle au niveau de l’ensemble du Cosmos, et vise à recréer un ordre différent pour l’homme. Mais cette voie du Shugendo ne resta pas une voie « innocente » : elle devint une pratique en vue de pouvoirs, vite déformée et récupérée par les plus avides. Puisant dans les aspects ésotériques du Taoïsme chinois, du Bouddhisme tantrique et du Shintoïsme japonais, que l’on mélangea, on se mit à la recherche de pouvoirs magiques en vue d’agir sur les esprits et les corps. Certains exercices, à base d’ascétisme et d’incantations, étaient censés développer les pouvoirs des adeptes du Shugendo. On vit de nombreux Yamabushi, crédités de pouvoirs surnaturels, mais surtout animés d’une énergie puisée au contact de la nature et d’une ambition qui les rendait prêts à tout, s’attacher au service de tel ou tel grand féodal (Daimyo) et les aider de leur magie noire pour vider querelles et vengeances privées. Ces Gyoga, redoutables et craints, étaient souvent dépositaires d’authentiques secrets d’efficacité qui nimbèrent leur existence d’un voile de mystère et les faisaient entrer vivants dans la légende.

Le Shingon fut la seconde direction de recherche et d’action pour l’acquisition de pouvoirs magiques. Il s’agit d’un autre avatar du Bouddhisme puisé à la source chinoise qui apparut au Ixe siècle et qui fut combiné aux autres pratiques initiatiques déjà en usage dans l’isolement des montagnes. Egalement basé sur le Tantrisme, le Shingon enseigne l’unité universelle et la solidarité de l’homme avec le cosmos. A l’origine de cette nouvelle secte, le moine Kukai et un rayonnement qui grandit après sa mort, en 835. Les aspects occultes ou ésotériques du courant Shingon (Mykkio) ne furent pas bien évidemment pas toujours correctement assimilés par le commun des mortels, mais un certain nombre d’éléments spectaculaires en furent dérivés et, le temps passant, intégrés dans le cadre d’autres pratiques magiques aux racines plus anciennes. Ainsi la pratique des Mudra (arrangement rituels des doigts et des mains), accompagnée des Mantra (récitation de formules sanscrites), qui est censé susciter une orientation des forces cosmiques au profit de celui de la maîtrise. On en retrouve le principe dans la tradition ninja : le ninja en effet procédait de même, liant et entrelaçant ses doigts sous les yeux médusés de ses adversaires afin de concentrer son énergie, se protéger des forces adverses, ou préparer une attaque éclair. Gestes magiques réputés à la source  de leur quasi invulnérabilité, aux effets démesurés aux yeux d’une population superstitieuse et inculte. On voit l’enchevêtrement des racines du ninjutsu, puis du Nin-po, puisant largement dans le contexte spirituel de ces premiers siècles de gestation religieuse et philosophique de l’ancien Japon.

Ainsi lorsque la technique ninja proprement dite va apparaître, sous le stimulus des terribles guerres civiles qui mirent pendant des siècles le Japon à feu et à sang, à mesure que la société nippone se hiérarchisa, se structura et se figea, sans plus aucune place possible pour les marginaux reclus dans leurs montagnes, elle ne sera plus que, tout naturellement, le prolongement d’un état d’esprit et d’un mode de vie entouré de tradition magique, incompréhensible, d’abord largement inquiétante puis source de terreur pour ceux qui eurent affaire aux communautés des ninja.       

Les origines d'un art martial (partie 2) : de la Chine au Japon


Il parait tout à fait vraisemblable que les premiers éléments de « l’art de l’invisibilité » vinrent de Chine, comme ce fut le cas de toute la base de la civilisation japonaise. On trouve également trace de ce même concept chinois dans l’ancien royaume coréen de Silla (sud-est de la péninsule de Corée), qui l’appela Shin-Bop et eut sous le nom de Sul-Sa le même type de guerrier, homologue du Ninja. Mais plus encore la Corée, les îles japonaises ont été le cul de sac où aboutirent quantité de courants spirituels et techniques venus de l’Inde, du Tibet, de Chine, de toute l’Asie du sud-est. On y trouve, mêlés, des enseignements philosophiques et religieux, des pratiques ésotériques, de profonds éléments de connaissance de l’homme et de la nature, des techniques de combat ou de simple survie, autant d’héritages que les japonais amalgamèrent à leur goût pour faire leur propre culture. C’est ainsi notamment que l’enseignement du célèbre sage chinois Sun Zi (Sun Tzu) qui vécu au VIe siècle avant JC, fut introduit au Japon à partir du VIe siècle après JC. On y trouve les premiers conseils pour harceler l’ennemi, le déconcentrer, l’infiltrer, l’abuser. Autant de domaines dans lesquels excellera le ninja. 

Le Japon de l’époque des Soga (début du VIIe siècle) s’ouvrit en effet largement à la civilisation du continent. Le bouddhisme fit alors son apparition et la cour impériale l’adopta rapidement car Iname, un puissant ministre de l’époque, y voyait un outil politique plus encore qu’un véhicule de culture chinoise enrichissante. Ainsi, en répandant avec force la nouvelle religion, Iname, puis son fils Umako, plongèrent-ils le Japon dans une terrible lutte entre les tenants du Bouddhisme, la religion importée, et ceux du Shinto, l’ancienne religion indigène. C’est dans ce contexte troublé qu’apparut le prince impérial Shotoku-taishi (572-621), champion de la culture chinoise qu’il continua d’imposer à la cour et à travers le pays par la construction de temples. Or plusieurs sources sérieuses font état de la création par Shotoku d’un véritable corps d’agents secrets engagés pour épier les clans d’oppositions et les réduire…On sait aussi qu’un certain Otomo-no-saijin (Kuhi) contribua fortement à la victoire de son jeune prince, Shotoku, sur son adversaire Mononobe Moriya, dans leur lutte pour le territoire d’Omi et que, pour le récompenser, Shotoku le gratifia du nom de « Shinobi » (furtif). Compliment impérial ! Or, comme on le sait déjà, l’idéogramme pour « Shinobi » se lisant aussi « Nin », il semblerait bien que l’on puisse établir dès cet instant de l’histoire du Japon un rapport tout à fait direct, au moins en ce qui concerne un comportement, une intention et un procédé. Il n’est cependant pas encore question de techniques bien caractérisées. Celles-ci vont finir par apparaître lentement, individualisées, ici et là, au cours des siècles suivants, permettant la réalisation pratique de ce qui ne fut longtemps qu’un état d’esprit. Cette lente gestation d’un nouveau type de guerrier se fit dans le secret des montagnes autour de la ville impériale de Kyoto, au centre du pays : pendant cinq siècles, l’histoire du ninjutsu se confondit avec celle d’un certain nombre d’autres marginaux qui avaient choisi de vivre dans l’isolement des montagnes. 

Les origines d'un art martial (partie 1) : de la légende à la réalité



Il existe de très nombreuses théories sur les origines du ninjutsu. Elles sont toutes invérifiables, ne reposant que sur quelques très rares archives ou traditions orales, partiales ou orientées, des écoles (Ryu) de ninjutsu, dont quelques fragments ont parfois survécu à l’épreuve du temps. Bien évidemment, chaque maître-héritier actuel a développé sa propre théorie, qui fait remonter l’existence de son école à un lointain passé. Or il convient de ne pas perdre de vue que de nombreux siècles ont passé avant que ce que l’on a fini par appeler un jour « ninjutsu » ait pu être considéré comme un véritable système codifié en soi. Ce fut en réalité la rumeur publique qui finit par donner un nom à quelque chose resté longtemps très flou par définition. Ces hommes qui surgissaient et disparaissaient à volonté, espions, agents secrets, laissant dans leur sillage la mort et la crainte superstitieuse, auréolés du mythe d’invincibilité, avaient un comportement bien d’avoir un nom ou, encore moins, d’appartenir à un style ou une école. C’est qu’il faut remonter loin dans l’histoire du Japon. Ce que faisaient ces hommes, et surtout la manière dont ils y arrivaient, était par définition entourée de mystère et de confusion parfaitement voulue et soigneusement entretenue. Le ninjutsu s’individualisa lentement au cours des siècles, comme une véritable contre-culture de celle qui parallèlement, était en train d’être créée par l’aristocratie militaire mise en place par le Bakufu. Ses racines sont profondes et très tenues. Une légende de l’ancien Japon veut que le nom du premier empereur de l’île, Jimmu Tenno, descendant de la déesse du soleil Amaterasu, et qui monta sur le trône en l’an 660 avant JC, fut déjà lié à ce qui sera bien plus tard appelé le ninjutsu. En effet, au cours de sa guerre contre le Seigneur d’Iso, Jimmu se vit soudain dans une position délicate : l’ennemi était en train de prendre le dessus. Au cours de la nuit suivante il eut un rêve où il se vit prendre de l’argile sur le Mont Amakaga, avec laquelle il façonna une tasse raffinée qu’il offrit aux Dieux pour les prier d’intervenir en sa faveur. Le seul problème était que ce Mont Amakaga, montagne sacrée, se trouvait au milieu du territoire tenu par les forces d’Iso. Jimmu put cependant concrétiser son rêve grâce à l’intervention efficace de deux de ses sujets dévoués, Shinetsuhiko et Otokashi, qui, déguisés en couple de paisibles paysans, s’infiltrèrent dans les lignes ennemies et ramenèrent l’argile …ce clin d’œil de la Fortune redonna courage aux troupes de Jimmu qui remporta la victoire. S’agissait-il là des deux premiers ninja de l’histoire ? En tous cas ces premières techniques d’infiltration de l’ennemi, utilisant notamment l’art du déguisement, se retrouvèrent chez des personnages dont l’histoire a retenu les noms, Okume Mei, Tennin Nichimei et Otomo Uji, qui les perfectionnèrent et les transmirent à leur tour.     

Qui étaient les maîtres-espions du japon médiéval?

Un ninja ou shinobi était un guerrier-espion dans le Japon médiéval. Le terme utilisé pour désigner une femme ninja est kunoichi . Les Ninja, dont le mot NIN signifie persévérance, en japonais, étaient (et sont toujours…) des gens à multiples facettes mais qui n'avaient besoin d'utiliser la violence que lorsque les circonstances l'exigeaient.

Leur technicité, en avance sur la majorité des connaissances de leur temps, et surtout leur ingéniosité mêlée d'audace leur a valu bon nombre de légendes dont certaines (notamment l'incompréhension quant au fait que les Ninja pouvaient "voler et marcher sur l'eau") ont généré les travers que l'on peut voir au cinéma aujourd'hui.

Dans l'imaginaire des Occidentaux et même des Japonais, image d'ailleurs largement colportée par les films, bandes dessinées... on représente les ninjas comme des guerriers vêtus de noir, une cagoule masquant leur visage, accomplissant des exploits physiques en combat, des acrobaties, et experts dans les techniques de dissimulation, d'empoisonnement, et surtout de diversion. Leur atout principal était leur furtivité et leur discrétion.

Les ninjas étaient en effet probablement issus de ces deux provinces voisines situées à côté de Kyoto. Ces provinces étant indépendantes, ils n'étaient redevables d'aucune taxe et jouissaient d'une liberté de mouvement que n'avaient pas les bushi (ou samouraïs), qui étaient eux inféodés aux daimyo (seigneur féodal) ; ils n'étaient pas non plus soumis au bushido (code de l'honneur du bushi), et pouvaient donc pratiquer des techniques de guerre non-orthodoxe (espionnage, guérilla, embuscades, assassinats).

N'étant pas liés aux grandes familles, celles-ci les utilisaient pour leurs basses besognes (pillages, assassinats). Une de leurs grandes spécialités était de s'introduire de nuit dans les châteaux et camps militaires et d'allumer un incendie, afin de faciliter l'assaut par des troupes classiques ; ils se déguisaient en général pour porter la même tenue que leurs victimes (ils n'étaient donc pas forcément vêtus de noir) afin de semer la confusion.

Par ailleurs, les familles nobles commencèrent à faire appels à des mercenaires (sans doute des ninjas) lors de la période Kamakura (1185-1333), période marquée par de nombreux conflits entres familles et assassinats. Ces pratiques, même si elles ne correspondaient pas au « canon » du bushido, ont donc très tôt été utilisées par le pouvoir et les seigneurs féodaux.

Aux yeux de la population, les ninjas, par leur activité criminelle (assassinat, vol, etc ...) et leur méthode peu orthodoxe (incompatible avec le code d’honneur des samouraï), faisaient partie de la classe sociale Hinin (non-humain). La caste des Hinin que l’on appelait péjorativement les « déchets de la société », comprenaient les criminels, mendiants, vagabonds et autres parias de la société.

La renaissance dans la culture japonaise

La fin de la seconde guerre mondiale va faire ressurgir les ninjas dans la culture japonaise. En effet, les japonais sont totalement vaincus pour la première fois de leur histoire. Le choc psychologique est énorme. Pour raviver le nationalisme, il élèvent au rang de grand héros le samouraï qu'ils opposent au ninja, pour mieux exacerber l'image du chevalier sans peur et sans reproche. Pourtant capable de vaincre seul plusieurs adversaires, le ninja inspire alors une fascination teintée de crainte.

En 1957, Sampei Shirato publie le manga Ninja Bugeicho relatant la vie d'un ninja dans le Japon féodal. C'est un succès immédiat. Un an plus tard, Fukuarô no shiro (le château de la chouette) de l'écrivain Shiba Ryôtarô, récompensé par le prix Naoki, devient un best-seller. La société s'identifie à ces ninjas féodaux volontaires, endurants, dont le statut de guerrier n'est pas accepté. Le Japon tient son nouveau héros. Peu à peu il acquiert des capacités surnaturelles comme la maîtrise de la magie ou celle des éléments.

Le filon n'est pas près de s'épuiser! Le cinéma, la BD, les mangas (avec Naruto en 1999), ou le jeu vidéo (Tenchu en 1998), popularisent les ninjas dans le monde entier. Tarantino, dans son film Kill Bill (2003), donne au maître artisan qui forge le sabre de l'héroïne le nom du grand maître Hattori Hanzo.

Le ninja est bien devenu un mythe, un super héros ou vilain des temps modernes, mystérieux et insaisissable, loin de son image d'origine : bref, un super produit marketing.

Histoire des ninjas


Les ninjas étaient a priori à l'origine de troupes formées entre le VIIIème et le IXème, d'émigrés coréens, chinois, et de bushi (guerriers) vaincus sans seigneurs qui se sont réfugiés dans les provinces d'Iga et de Kôga. Ayant en commun le déracinement et la défaite, ils développèrent des techniques de survie dans ces contrées sauvages, ainsi que des techniques de combat pragmatiques provenant d'origines diverses. Ils subirent sans doute l'influence :

de pirates (kaizoku) de la région de Kumano, à qui ils doivent les techniques d'utilisation des grappins,

des Yamabushi, ascètes vivant dans la montagne et adeptes du shugendō (pratiques mystiques),

des moines bouddhistes de la région, notamment des bouddhistes ésotériques shingon,

et des hinin, personnes de basse condition sociale utilisées pour les tâches jugées impures, notamment en relation avec le sang et le cuir.

À cette époque, Makibi Kibi, ambassadeur japonais en Chine, amena au Japon les doctrines militaire chinoises, dont L'Art de la guerre de Sun Tzu. L'établissement dans ces contrées sauvages et entourées de montagnes, donc sans grand intérêt économique et protégé des invasions des seigneurs voisins, a sans doute contribué à développer un esprit d'indépendance, et notamment l'absence d'attachement à un seigneur et aucune réticence morale à se retourner contre d'anciens alliés. Cela a aussi contribué au secret et donc à l'aura de mystère qui les entoure.

Parmi les probables fondateurs du ninjutsu, on compte le général chinoisIkai qui s'exila à Iga au milieu du XIème siècle et ramena des techniques de combat. Les ninjas étaient sans doute à l'origine des troupes de guerriers similaires à des milices civiles (jizamurai) dont le but était la défense de la province ; ils n'étaient probablement pas uniquement des guerriers mais exerçaient un autre métier (paysan). Il est difficile de donner une date exacte de l'apparition des ninjas, il s'agit sans doute d'une évolution progressive. Le premier recours documenté daté de l'utilisation de ces troupes d'Iga et de Kôga (les Iga shû et les Kôga shû) est sans doute l'attaque du château du seigneur Rokkaku à Magari par le seigneur Ashikaga vers 1487. Ieyasu Tokugawa, qui fut daimyo (seigneur féodal) puis shogun (dictateur militaire du Japon) au XVIème siècle eut fréquemment recours à ces mercenaires. Mais les ninjas étaient aussi parfois des guerriers inféodés à leur seigneur et n'ayant aucun rapport avec Iga et Kôga, comme par exemple ceux utilisés par Shingen Takeda à la même période.

L'événement le plus important fut sans doute la sanglante soumission de la province d'Iga par les troupes de Nobunaga Oda en 1579. Nobunaga était le régent (bien qu'il ne fut pas nommé shogun par l'empereur), et l'indépendance d'Iga représentait un défi à son autorité. Les deux premières tentatives de soumission se soldèrent par un échec. Pour la troisième, il envahit la province avec six armées venant de six endroits différents. Devant le nombre écrasant d'adversaires, les techniques de guérilla se révélèrent insuffisantes et les familles d'Iga furent massacrées. Quelques survivants allèrent se réfugier chez les daimyō voisins (dont Ieyasu Tokugawa) et se mirent à leur service.

À partir de là, certains ninjas, nommés onmitsu, furent utilisés par le shogun pour espionner les daimyo, et d'autres, les oniwaban, étaient utilisés pour assurer la sécurité rapprochée du shogun et la surveillance de son château, ainsi que dans une certaine mesure la police dans la capitale Edo. En effet, la pèriode Edo se caractérise par une relative paix entre les clans, les techniques de maîtrise non armées ou avec des armes non tranchantes développées par les ninjas étaient particulièrement intéressantes dans ce contexte.